Le Viet Nam

Envoi : Mail 8
Date : 20 avril au 3 mai 2001
Lieu : Bangkok
Kilométrage : 11500

La nuit tombe sur le poste de frontiere de Dong Dang, dit "de l'Amitie".
Je comptais dormir ici et passer la frontiere demain matin, mais les militaires s'y opposent.
Dernier regard côté chinois.

Apres une fouille minutieuse (le terme approprie serait "viscieuse") de mes sacoches par lesdits militaires, je traverse les 200m qui separent les deux frontieres avec hesitation. Car si le tampon sur mon passeport certifie que je viens bien de quitter la Chine, la frontiere vietnamienne, elle, est sensee etre fermee depuis 45 minutes.
Vais-je dormir dans ce no-man's land ?
Les policiers vietnamiens se montrent sympas, jettent un oeil distrait a mes sacoches, tamponnent mon visa et reouvrent la frontiere.

 

Entrer au Vietnam, c'est entrer dans un pays qui ne vit en paix que depuis une quinzaine d'annees, le conflit avec la Chine (dans la region de ce poste-frontiere "de l'amitie") ayant relaye les guerres du Vietnam.
Aujourd'hui, le pays est pris d'une frenesie de reconstruction, et les maisons (qui portent souvent l'annee recente de leur construction), semblent pousser comme des champignons.

Je roule au Vietnam...

Dans une longue descente vers Nanning, j'avais croise mon unique voyageur a velo (allemand, comme il se doit!) qui revenait du Vietnam. Le recit de ses mesaventures m'a permi d'aborder certaines particularites du pays avec serenite.
Explications.
Les vietnamiens sont reellement un peuple tres chaleureux, curieux envers tout ce qui vient de l'occident, en particulier par ce qui est americain(!). Seulement, ce qui frappe l'occidental lambda qui debarque de l'aeroport, c'est le systematisme de l'arnaque vis-a-vis des touristes. Jamais mechante, rarement agresive, les sourires sont bien la, meme quand ils vous annoncent que ce Coca a 2 balles en vallait 20, trop tard, tu viens de l'avaler! Tous les prix, ou presque, sont majores de 50 a 300%. Avec le sourire. Facon "coutume locale".
Je souligne que le marchandage avec le Vietnamien n'est ni genant, ni humiliant (et pour ton porte-monnaie, c'est vital).
Des relations tres sympathiques peuvent se creer apres l'achat d'un produit dont on vient de casser le prix par 3... c'est simplement une "etape culturelle" a franchir (avec le sourire, sinon on se casse juste les dents mais les prix bougeront pas : n'oublions pas de leur sauver la face!) et qui ne remet pas en cause la qualite de l'echange qui peut eventuellement s'ensuivre.

Reste que le touriste en question aura peut-etre perdu l'envie de tailler une bavette.
Je peux le comprendre... Pour ma part, la traversee de la Chine m'ayant suffisament petrie, j'ai perdu ce premier "mouvement d'humeur" quand une face souriante vous annonce joyeusement que ce paquet de gateaux a 5 balles en vaut 30.
Hanoi est la premiere grande ville asiatique qui me plait.
Ville basse, trouee de lacs, garnie d'arbres et de parcs, et dont certains quartiens degagent un charme provincial assez deroutant pour une capitale.
Je laisserai mon velo a l'hotel pour realiser un vieux fantasme malsain : flaner dans la ville en rickshaw... ou comment concilier mon amour du velo et celui de la glande. (Je precise que plein de remords devant le pauvre bougre qui tirait mes 73 kilos -et oui, faites du velo dans le desert, mesdames, vous perdrez 7 kg-, je l'ai paye grassement, avec une bonte dans le regard qui n'etait pas sans rappeller P.Swayze dans la "Cite de la Joie".)
De Hanoi, je passe le fleuve rouge et met le cap sur le Golf de Tonkin.

Les rizieres apparaissent. Pedaler au milieu de ces oceans verts est indescriptible.

Bizarre parfum d'enfance ("bizarre" parce que les rizieres en Seine-St-Denis...c'est pas vraiment ca. Nous, on a le "Sausset", c'est pareil sans le riz)

Au Vietnam, il est possible de dormir chez les gens qui vous invitent, pour peu qu'on sache sourire avec effusion au policier du bled, et ce faisant, lui prouver son utilite a la societe.

Touché, celui-ci poussera la gentilesse jusqu'a monter la garde aux roues de mon cher velo.

Je mettrais bien celui-ci (mon velo, pas le policier)dans un bateau pour aller flaner sur les petites iles de la baie d'Along... les photos des agences a Hanoi etaient eloquentes : jonques glissants sur une mer emeraude, pics karstiques et iles de calcaires...

Patience bonhomme.

Tu finiras bien par troquer un jour ton velo pour un voilier...